Les premiers pas dans une nouvelle ville sont toujours un peu délicats - Sydney#1 

La rentrée s’était très bien déroulée à Poudlard bien qu’elle ait été très intense. Après tout, nous avions été contraintes, pour notre plus grand bonheur, de renouveler l’équipe enseignante, nos collègues Pozhiratelis ayant été mis sur le carreau. Nous avions donc accueilli nos nouveaux professeurs recrutés durant l’été et j’avais fait en sorte de rester à l’école les premiers week-end pour m’assurer qu’ils prenaient bien leurs marques. Passer du temps avec eux, répondre à leur question, les aider à s’installer, cela faisait également parti de mes fonctions d’adjointe. Jusqu’à maintenant, aucun désistement n’était à prévoir, je pouvais donc quitter mon travail sereinement pour un week-end en famille. Puis, je laissais derrière moi Tiphaine qui était tout autant compétente que moi, avec peut-être la diplomatie en moins. Nous avions adopté ce système de garde alternée de l’école depuis l’an passé et je n’étais jamais rentrée en catastrophe pour cause d’élèves ou professeurs trucidés par ses soins.

Ce samedi je me promenais avec Eliott dans les rues de la Grande Ville Marchande. Nous avions fait un saut au salon du livre pour trouver de jolis ouvrages à son goût, puis nous avions pris la direction des petites rues pour flâner. Cela nous changeait de nos habituelles balades dans le parc de la ville, puis c’était un bon moyen d’aiguiser sa curiosité en observant les différentes vitrines. Effectivement, il ne cessait de me questionner sur les objets qu’il voyait et qu’il ne connaissait pas. J'aurais bien aimé avoir Lucas sous la main pour m’aider face à ce flot d’interrogations mais ce dernier préparait ses cours à la maison. Pour lui aussi la rentrée n’avait pas été mauvaise. Fatigante et angoissante certes, enfin rien de plus normal après un long congé. En tout cas, il avait été heureux de passer de nouveau beaucoup de temps avec Paul.

Heureusement pour moi Eliott se fatigua bien vite. Malheureusement, ses petites jambes suivirent le mouvement et je dus le porter un instant. Le petit monstre avait bien grandi si bien qu’il était moins évident de le tenir longtemps dans mes bras. En même temps, lui aussi avait pris le chemin de l’école. Enfin, tout cela était le signe qu’il était l’heure de rentrer à Londres. Je pris d’un pas rapide le chemin le plus rapide pour rejoindre le cœur de la ville. Je ne transplanais jamais avec Eliott, si bien que je devais rejoindre le réseau des cheminées. Nous nous étions bien enfoncés dans le dédale de petites rues mais le chemin ne nous prendrait pas plus d’une quinzaine de minutes, je pouvais largement le porter jusqu’à là.

Au détour d’un chemin une voix m’interpella. Je regardai en face de moi une dame avec ses deux enfants. Elle m’indiqua qu’elle n’était pas du coin et qu’elle était perdue. Ce genre de chose n’était jamais agréable mais avec deux petits cela devait être d’autant plus angoissant.


Soit elle avait une adresse en tête soit elle cherchait simplement à retourner sur ses pas. Dans les deux cas je connaissais suffisamment la ville pour lui donner des instructions précises. Dans le deuxième cas, elle pourrait même me suivre. En attendant sa réponse je lui rendis son sourire.

Grande Ville Marchande

Pando

La femme cherchait un endroit pour se sustenter avec ses enfants. Il était clair qu’enfoncer ici dans la ville, ils ne trouveraient pas grand-chose. Les petites rues accueillaient davantage les boutiques de création et les librairies indépendantes. Pour trouver de quoi se restaurer il fallait rejoindre les plus grosses avenues où se concentraient grandes boutiques essentiellement de vêtements, café et restaurants. Sinon il y avait également des stands au cœur du parc, pour redonner de l'énergie aux marcheurs et aux enfants s’étant défoulés sur les aires de jeux. L'avantage était que j’allais moi-même rejoindre le cœur de la ville pour accéder au réseau des cheminées, la femme et ses enfants pourraient donc me suivre.


Je lui souris. Je n’étais pas d’une carrure impressionnante et j’avais un enfant dans les bras, si bien que j’imaginais qu’elle ne trouverait rien de suspect ou d’inquiétant à me suivre. De toute manière, si en étant perdue elle s’était adressée à moi, c’est qu’elle ne percevait pas un quelconque danger dans cette entreprise.


La Grande Ville Marchande était comme son nom l’indiquait très grande. Cela dit, son fonctionnement n’était pas compliqué même pour des personnes qui la visitaient pour la première fois. En un passage il était déjà moins probable de s’y perdre. Puis, effectivement, depuis la rue principale, les lieux importants à savoir Feudeymon, le Secrétariat, l’esplanade, le stade et le parc, étaient signalés.

Je me remis en marche tournant la tête pour m’assurer que la femme et ses enfants me suivaient. Eliott toujours calme, observait les deux petits d’un œil intrigué. Il devait être partagé entre la fatigue et l’envie de tester ces nouveaux camarades de jeux tombés du ciel. Puisque les deux enfants de la femme restaient également calmes, il n’était pas encore tenté de les approcher.


En vérité la question était assez rhétorique. Le dôme n’était ouvert aux passages que depuis peu et la femme ne semblait pas être arrivée avant la création de ce dernier. Sinon, elle connaîtrait bien mieux les lieux. Enfin, c’était un moyen d’ouvrir la conversation et de la mettre à l’aise. Peut-être même qu’elle me confirait d’où elle venait et ce qui l’avait poussé ici-bas.

Grande Ville Marchande

Pando

Une fois en marche, j'écoutais la réponse de la femme. Comme je m'en doutais, son arrivée était récente. Plus que récente même, car elle se comptait en jours. J'acquiesçai. Cela ne devait pas être évident, bien que j'imaginais qu'elle ait fait le déplacement pour rejoindre des membres de sa famille. Sinon, pourquoi venir en Europe alors que le climat politique était encore tendu ? Certes les Pozhiratelis avaient été arrêtés. À ce stade, tous les procès avaient même eu lieu, ou alors il n'en restait plus beaucoup. Le nouveau gouvernement se remettait tout doucement en place et la société restait meurtrie. En définitif, ce n'était pas un lieu de vacances idéal car pleins de choses étaient encore à reconstruire. Je me notais donc de lui demander ce qui l'avait poussé dans les bras de notre beau continent. En attendant, elle me retourna la question que je lui avais posée.


Je lui souris en tenant toujours Eliott fermement dans mes bras.


Si c'était le cas, elle se familiariserait bien vite avec les lieux et aurait l'occasion de rencontrer des personnes venant de toute l'Europe. Dans le monde sorcier, cette ville était notre lien à tous. Les plus grandes institutions se trouvaient ici, les évènements importants ne se déroulaient pas autre-part. La Grande Ville tenait une grande place dans nos vies et nous permettait de nous rassembler. Cela dit, il ne fallait pas trop craindre la foule et parfois l'intimité du Chemin de Travers m'attirait davantage.


Dans mes souvenirs d'enfance cela ne me disait rien. Cela dit, une ville aurait pu voir le jour entre temps. Ou bien mes parents se tenaient éloignés de tels lieux. Enfin cette deuxième option me paraissait peu probable puisqu'ils aimaient le monde et leur travail de diplomates les menaient vers les gouvernements des pays qu'ils visitaient.

Quoi qu'il en soit, pour les questions je m'arrêtais là. La pauvre dame avait déjà subi deux interrogations à la suite. Puis la toute première question que j'avais en tête pouvait attendre, surtout qu'elle était plus intime. Elle n’avait d’ailleurs peut-être pas envie d’expliquer à une inconnue pour quelle raison elle se trouvait en Europe avec ses enfants. Il faudrait certainement que je réfléchisse à la formulation pour ne pas me montrer intrusive.

Grande Ville Marchande

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La femme me confirma qu’elle s’était installée dans une maison de la Grande Ville Marchande. Cela signifiait qu’elle se familiariserait bien vite avec les lieux. Puis, cela lui faciliterait les rencontres avec d’autres sorciers dans le cas où elle ne trouverait ou ne chercherait pas de travail. Ce sujet était de toute manière bien trop intime pour que je l’interroge. Qu'est-ce que cela pouvait me faire si elle travaillait dehors ou à la maison ? Je n’avais pas d’avis à donner ni même à avoir sur la façon de vivre des autres parents.

Le sujet suivant était plus large et concernait son continent d’origine. Autant la mettre à l’aise en discutant de ce qu’elle connaissait sans non plus entrer dans sa vie privée. Puis, cela me permettrait d’en apprendre plus sur les autres sociétés de sorciers. Depuis mon entrée à Poudlard, je m’étais fermée au monde diplomatique. Plus je m’éloignais des intérêts de mes parents, moins je souffrais de leur absence. J'adorais voyager tout en restant cantonnée aux lieux moldus si bien que je ne savais pas comment vivaient les autres mages. On pouvait longuement m’interroger sur la cuisine, mais très peu sur le fonctionnement des institutions ou sur les lieux magiques à ne pas manquer. Seules les écoles ne passaient pas en dehors de mes radars. Sur ce point, mon expertise était plus large car je ne cessais de me renseigner. Si seulement je pouvais mettre les pieds dans toutes les écoles magiques.

J’écoutais la réponse de la femme. À sa connaissance il n’existait pas une telle ville sur le continent asiatique. Peut-être parce qu’il était beaucoup plus vaste que le continent européen. Ou alors parce que les différentes sociétés n’avaient pas forcément d’intérêt à se regrouper. Ou était-ce, comme pouvait le signifier la dame, un manque d’intérêt pour les langues étrangères. Il faut dire que les sorciers européens ne s’étaient pas trop creusés les méninges et avaient adopté le modèle moldu en prenant pour langue officielle l’anglais. Décision totalement arbitraire à mon avis mais qui m’arrangeait bien. Malheureusement, nous avions tous été contraints d’adopter le bulgare pendant le gouvernement Pozhiratelis, si bien qu’à présent les deux langues étaient suffisamment familières à tous les européens, ou du moins la plus grande partie.


Je lui souris avant d’écouter sa question. Je connaissais très bien la ville mais je n’avais jamais travaillé ici. Ce n’était pas plus mal à mon sens, au moins j’associais pleinement mes visites ici au loisir de se balader et de profiter des boutiques et des lieux.


Nouveau sourire. Puisqu’elle m’avait posé la question du travail je pouvais certainement me permettre de lui retourner.


Comme ça, si elle s’occupait à plein temps de ses enfants ou si elle n’avait pas encore eu l’occasion de trouver du travail dans le coin, elle se sentirait moins pointée du doigt.

Grande Ville Marchande

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Nous tombions sur le même avis. Pour qu’une ville puisse rassembler l’ensemble d’un continent, il fallait forcément une langue commune et définie comme telle. En ce sens, la Grande Ville Marchande semblait être un lieu atypique aux yeux des sorciers d’autres régions du monde. Cela ne signifiait pas que l’ensemble des mages européens maîtrisaient parfaitement la langue anglaise, mais tout du moins suffisamment pour communiquer auprès des différentes instances ou institutions. En revanche, sa vision très centrée sur l’Asie de l’Est me surpris. La Chine un plus gros pays comparé aux autres ? Que faisait-elle de la Russie ? Quant à placer le japonais dans les choix, j’aurais beaucoup plus pensé à l’hindi, à l’arabe ou au persan beaucoup plus parlés sur le continent. Enfin, en cas d’une telle alliance, le mandarin serait certainement le gagnant, effectivement.

Le sujet de conversation suivant porta sur le travail. Je lui expliquai que j’étais professeure et elle me confia qu’elle était une mère au foyer diplômée en droit. Je la croyais sans peine en l’entendant l’expliquer que s’occuper des enfants était un travail éreintant. Lucas m’avait confié cette expérience, puis cela devrait être une évidence. Surtout que généralement ce travail s’accompagnait de celui de gestion du foyer.


En même temps entre les élèves, les collègues, les tableaux, les fantômes et même les escaliers, il était impossible de s’ennuyer. Pour ne vexer personne, je ne dirais pas qui de tout ce beau monde était le plus fatiguant.


Je lui souris. Moi qui pensais que les changements de couche et l’allaitement à toute heure de la journée serait le plus fatiguant. C'était oublier la capacité d’un petit bipède à se montrer curieux et téméraire. Enfin, comment leur en vouloir ? Ils remplissaient bien notre existence de bonheur.


J'espérais pour elle que sa condition de mère au foyer était volontaire, même si avec le recul elle ne semblait pas le regretter.

Grande Ville Marchande

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