(emma et charlie) - énième coup bas 

Ces vacances d’été avaient été les meilleures de toute ma vie. Ceci dit ce n’était pas bien compliqué car habituellement seules les semaines chez mes grands-parents étaient supportables. Et encore, ils commençaient au fur et à mesure à se faire vieux. Mais cette année j’avais pu éviter les traditionnelles vacances en famille et inviter Babylon à la maison. Mieux encore, mes parents étaient partis dans le sud-est avec le reste des Guérin. Nous n’avions eu à les supporter qu’une petite partie du séjour de mon ami. Ce dernier n’avait d’ailleurs pas été tant dérangé que ça par leur présence. Au moins ils ne m’avaient pas fait honte. J’avais donc fait des efforts pour me montrer aimable avec eux la fin de l’été. Petite récompense pour service rendu.

Tout ce blabla pour dire que je n’avais pas eu le temps de faire mes courses de rentrée. Le dernier samedi du mois je m’étais donc rendu à la grande ville marchande. J’aurais très bien pu faire mes achats à Paris, mais la grande ville était plus facilement accessible. De toute manière la capitale était une ville de trolls. Puis c’était ici qu’on pouvait trouver des ingrédients de meilleure qualité pour les potions. D’autres choisissaient cette ville magique pour se retrouver le temps des achats avant de repartir pour leur école respective. J’aurais pu faire de même avec mes rares amis de Durmstrang, mais bien sûr eux s’y étaient pris plus tôt. Il n’y avait pas de mal à ça. Nous étions tout de même le tout dernier weekend du mois et la rentrée était dans moins d’une semaine.

J’errais donc seul entre les boutiques. Mis à part pour les achats de première année pour lesquels mes grands-parents m’avaient accompagné, j’avais toujours passé cette épreuve seul. Et quelle épreuve. J’aurais pu faire quelque chose de beaucoup plus intéressant à la place. Les boutiques c’était une plaie, et vu le temps j’aurais préféré profiter une dernière fois de l’océan. L’année prochaine j’engagerai un larbin pour le faire à ma place, après tout c’était à la portée du plus abruti. Avec un peu de chance je n’aurais même pas à débourser une pièce. Cette année j’allais faire passer les castings.

J’avais donc commencé par renouveler ma papeterie. Je n’avais plus de quoi écrire et c’était tout de même l’essentiel. J’étais ensuite allé chercher un nouveau chaudron, qui me servirait de sac. Vu la détestation que j’avais pour la confection des potions je me moquais bien d’abimer ce truc encombrant. J’en avais également profité pour refaire le stock d’ingrédients. Et oui les cours étaient malheureusement obligatoires. Pour ce qu’ils allaient me servir pour le BAC. Je ne comptais pas sur cette matière pour avoir mon diplôme de fin d’études. Il ne me restait donc que les livres. Mes tenues je les ferai ajuster à Boisjoli une fois au palais. Je ne faisais confiance qu’aux français pour mes tenues de classe. Après tout on ne pouvait pas prévoir sur qui on allait tomber ici, à la grande ville. Puis je n’avais pas tant grandi que ça durant l’été alors pour une petite semaine la tenue passerait bien.

Les livres donc, je me dirigeais vers la boutique bien content que l’épreuve soit sur le point de se terminer. Dans une heure grand maximum je serais de retour à Bordeaux. Mes plans ne se passant jamais comme je le voudrais, pauvre adolescent que je suis, j’aperçus dans la boutique une fille de mon école. Je n’avais pas franchement envie de perdre mon temps avec elle, parce que oui cette nana était un vrai trou noir, alors j’avais opté pour l’option évitement. C’était sans compter sur le coup d’œil indiscret sur les livres qu’elle tenait. Elle était en quoi, cinquième année, et aucun des livres qu’elles avait dans les bras étaient dans ma liste l’an passé. Curieux. Je passais au comptoir payer mes bouquins et après une hésitation je décidais de l’attendre à la sortie. Espérant qu’elle ne m’ait pas vue ça aller être drôle de voir sa tête quand je l’accueillerais comme une fleur. N’empêche cette harpie allait encore me faire perdre mon temps.


Le bonjour comment vas-tu à la Charlie. Ou alors l’approche réservée aux personnes de type Emma Duval.

Petit air condescendant de sa part. Je suppose qu’elle cherche à rivaliser avec le mien. Bon courage princesse, ça fait un moment que je n’ai pas fait chier quelqu’un et là je suis en manque. C’est que j’ai évité de faire le zouave en présence de Babylon. Je suppose qu’il n’est pas trop du genre à me suivre dans mon obsession de faire suer les gens. Puis je ne suis pas sûr qu’il validerait vraiment mes mots et mes actes. C’est pas qu’il est con et qu’il ne sait pas comment je fonctionne, mais j’essaye juste de bien me comporter en sa présence. Peut-être que je n’ai pas envie de trop le décevoir. C’est honteux en vrai. Bref il est reparti chez lui et j’ai une superbe cible à emmerder alors pas de quartier.

Je lui glisse un sourire fier. J’adore ces moments où les gens apprécient pleinement l’étendue de ma connerie. Ce petit Guérin à la fin en prime. Franchement ça me met en joie d’attirer comme ça l’attention. En vérité elle aurait pu ne pas me connaître autrement qu’un des rares mecs de l’école. Mais non elle sait qui je suis et elle sait comment je suis. J’ai réussi une sacrée entreprise dans cette école. Me faire connaître comme ça par des gens d’autres maisons c’est un sacré succès. Bon pas sûr que certains gardent de bons souvenirs mais au moins ils se souviendront de moi. Je ne serai pas un de ces nazes qu’on oublie dès leur sortie de l’école. Par exemple Emma Duval je pourrais débarquer à la rentrée en annonçant qu’elle ne reviendrait pas et peu de gens arriveraient à la resituer. C’est triste pour elle je trouve. En fait non pas de pitié pour ces gens.


J’espérais qu’entendre son prénom et non son nom sortir de ma bouche soit plus compliqué. Le sommet du foutage de gueule selon moi. Surtout que j’avais l’habitude de l’appeler Duval ou de trouver des surnoms stupides. Au fond c’était un plaisir de la rencontrer dans les couloirs, dommage qu’elle se barre.


Je ne saurais pas dire pourquoi je ne pouvais pas l’encadrer à ce point. Sans doute sa tête qui ne me revenait pas. Avec d’autres gens je suis plus subtile. Il ne faudrait pas non plus que je sois catégorisé par toute l’école, professeurs compris, comme le pire connard de l’univers. Les gens me connaissent mais la plupart ne se rendent pas compte qu’ils sont des cibles. Puis ceux qui ont compris mon jeu ne se donnent pas la peine de prévenir les autres. Souvent des renards comme moi. La ruse c’est notre ADN.


Elle cherchait juste à faire son intéressante. Encore une fois. Ou alors elle ne disait pas tout.

L’ironie lui allait mal. Je commençais à penser qu’au lieu de m’acharner sur elle depuis tant d’années j’aurais mieux fait de lui donner quelque cours, juste histoire de la rendre plus intéressante. Finalement c’était juste une cible de plus. Une personne dont la tête ne me revenait pas et qui avait en plus une attitude qui vouait à être méprisée. Elle se pensait forte et intéressante. Elle pensait être plus importante que les autres. Or elle avait tout faux. C’était juste une fille normale qu’il fallait faire redescendre.

Elle n’était d’autant plus pas douée que je percevais sa tentative d’ironie comme une carapace. Mais contre quoi, je n’en avais aucune idée. Cette fille ne m’intéressait pas, mais j’étais bien trop curieux pour la laisser filer en restant dans l’ignorance. J’étais une râpasse prêt à attendre des heures pour voir agoniser ma proie et enfin m’en délecter. J’étais un renard qui allait trouver la faille dans le poulailler qu’était son cerveau.


J’en venais même à donner des conseils. Quel triste monde. Enfin devant certains cas sociaux comme la demoiselle Duval il fallait lâcher le bâton et donner un léger coup de pouce. Surtout que je voulais savoir ce qui la tourmentait. Pourquoi une fille comme elle attendait d’ailleurs le dernier moment pour faire ses achats de rentrée. Ce n’était absolument pas dans l’ordre des choses. Je comptais bien connaitre toute l’histoire et si pour cela il fallait que je sois un peu moins dans l’attaque et plus dans la manipulation je n’allais pas m’en priver.


Bien sûr je n’allais pas en plus lui soutirer de l’argent, quoi que si elle était assez bête pour penser cela je ne m’en priverais pas. Enfin elle devait avoir assez de jugeote, je l’espérais. Quoiqu’entendre des gens geindre devrait rapporter de l’argent, même si c'était ce qu'on leur demandait.