(charlie et lynn) - le retour du Phénix 

Qui était l’abruti qui avait fait sauter un hôpital ? Franchement, je parlais souvent de l’imbécilité des moldus, mais certains sorciers étaient aussi cons qu’un balai à brosse ou devrais-je dire bête comme un éclair de feu. Bande d’attardés ! Bon j’avais certainement utilisé suffisamment de synonymes pour qualifier toutes ces cloches, il était temps d’en venir au cœur DU véritable problème causé par cet événement. De la petite complication. De la grosse boulette. Lynn. Enfin je ne la désignerais pas exactement comme étant une boulette, mais un peu quand même. Beaucoup quand même. Les morts et les blessés ? Mais qu’est-ce que cela avait à voir avec moi ? Je m’en foutais !

Pour quelle raison avais-je vu sa tête dans le journal avec la mention “l’inconnue de Feudeymon” ? Je n’avais pas lu la suite de l’article, j’attendais sa version orale. De toute manière, j’étais au travail lorsque j’étais tombé sur ledit article et j’avais d’autres chats à fouetter. Genre à me demander où elle était tout ce temps. Ou pourquoi était-elle à ce point chanceuse pour se retrouver dans un hôpital ciblé par des bombes. Si ça se trouve c’était elle le corbeau visé par l’attaque, car de ce que j’avais compris, une des revendications était de se faire des Pozhiratelis. En tout cas, lorsqu’elle était partie je m’étais imaginé qu’elle était en plein dans ses activités de mages noirs et qu’elle refusait de me contacter car je ne voulais pas en être. Je l’avais bien un peu cherché au début, mais comment dire, un étudiant ne pouvait pas quitter son école comme il le souhaitait et au bout d’un moment si elle ne voulait plus de moi dans sa vie je n’allais pas lui courir après.

Enfin, j’étais quand même content de retrouver sa trace, même si le petit problème causé par son retour portait un autre nom. Ludmila. Pas envie de choisir le meilleur parti. De toute manière, je n’étais pas obligé de me justifier auprès d’elles, elles me faisaient déjà beaucoup trop galérer l’une et l’autre.

Je ne travaillais pas aujourd’hui, petit un parce que c’était le week-end, petit deux parce qu’il s’agissait du dernier jour de l’année. Il n’y a pas à dire, ils n’étaient pas cruels avec les stagiaires au Ministère français. J'étais donc descendu dans ma rue pour acheter un bouquet de fleurs. Du genre pas trop cher mais quand même beau. Comme j’étais à Paris, avec ce genre de critères, il n’était pas vraiment gros. Qu’elle se plaigne cela dit. Puis, j’avais transplané dans la Grande Ville Marchande pour rejoindre Feudeymon. Ou devrais-je dire le bâtiment de fortune qui servait d’hôpital en attendant que les travaux de reconstruction se terminent. A l’accueil un sorcier me fouilla puis une femme m’indiqua la chambre tout en m’expliquant qu’il faudrait que je sois parti dans une heure. Parfait pour moi, il faudrait bien que je me prépare pour ma soirée du nouvel an.

Je toquai à la porte avant d’entrer sans y être invité. Elle n’allait tout de même pas se plaindre d’avoir un visiteur. Franchement, pour une chambre aménagée rapidement à partir de pas grand-chose elle n’était pas si mal. Au fond de la pièce Lynn était dans son lit.


Grand sourire béat sur mes lèvres. Bon d’accord j’étais content de la voir. Quoi que mon petit doigt aurait dû me dire que ça n’allait pas durer.

Un légume. Un putain de légume. Oh non de non. Comment pouvait-on m’oublier ? Moi ? La meilleure personne au monde. J’étais à deux doigts de lui jeter mon bouquet à la figure et me barrer. C'était donc ça l’arnaque ? Je retrouvais par miracle sa trace au bout de quasiment deux ans et elle était incapable de me remettre. Mais à qui allais-je reprocher de ne pas m’avoir donné de nouvelles ? Puis c’était quoi cette histoire absurde de coma. Elle avait dû se prendre le plafond sur la tête pendant l’explosion. Un légume.


Retour à la case départ du sourire niais. Bras qui s’affaissent. Voix qui reprend son naturel blasé. Un instant magique de retrouvailles. Bon réfléchit Charlie ! Quelle était la meilleure option pour moi. M'acharner à lui faire retrouver la mémoire ? Flemme. Je n’avais aucune patience et suffisamment de dignité pour m’épargner ce spectacle. Je n’étais pas du genre à faire des efforts pour une cause je pensais perdue. Me barrer ? Franchement c’était ce qui me tentait le plus. Mais non, pas tant d’efforts dispensés pour rien. Pas ce magnifique minuscule bouquet acheté un bras pour finir à la poubelle. Et manquerait plus que ce soit l’autre Alisson qui en hérite. Certainement pas. Moi vivant jamais !

Sinon troisième option, je pouvais toujours discuter quelques minutes, voir si le naturel revenait au galop chez elle. Parce que clairement, si Lynn n’était plus Lynn ça ne valait pas le coup. Des meufs simplement mignonnes il y en avait pleins les rues. Son caractère de Manticore c’était quand même ce qui faisait tout son charme. Pas de commentaire sur mes goûts de chiotte lorsqu'il s’agissait de me faire des amis, si vous n’êtes pas convaincu c’est que vous ne connaissez rien à la vie. La seule exception à cette règle dans mon cercle affectif rapproché c’était Babylon. D’accord je l’adorais, mais franchement d’une je ne savais toujours pas pourquoi et de deux qu’est-ce qu’il était fatiguant. Toujours à geindre, capable de faire un gosse et d’accepter d’élever le dit gosse. Un mec à problème ce garçon.


Si on pouvait qualifier notre relation en ces termes. Nous étions amis oui mais du genre à nous balancer des sorts en pleine face pour le plaisir de se crêper le chignon. Je ne jugeais pas utile de lui refaire tout l’historique. Pas besoin de l’encombrer des détails tant qu’elle avait à sa portée l’essentiel. Quoi que notre rencontre “joute verbale” à la bibliothèque pour humilier une tierce personne était un très bon moment. Meilleur en tout cas que le jour où elle s’était fait passer pour mon admiratrice secrète pour me convaincre de rejoindre les corbeaux. Quelle idée de troll. Mais dans nos meilleurs moments il y avait quand même la période que j’avais passé en échange à Durmstrang, sans parler du meilleur réveillon de Noël de toute ma vie.


Si à mon prénom rien ne revenait, à ma façon de parler ça devrait forcément faire ressurgir quelques souvenirs. Je croisais les doigts car sinon j’allais devoir ajouter en quatrième et dernière option le meurtre.

Mon cœur s’arrêta une première fois face à son regard vide de poisson rouge et les paroles qu’elle prononça. Elle avait définitivement reçu un coup sur la tête. Bien sûr qu’elle avait des amis. Ou plutôt deux, parce qu’elle n’était pas vraiment du genre à se faire apprécier. Cela dit, pas besoin de l’accabler avec ce détail, surtout que les infirmières du service lui avaient déjà expliqués la chose. Elles exagéreraient tout de même, je n’avais pas traîné pour venir la voir, à croire qu’elle était à Feudeymon depuis un siècle. Les gens bossaient et ne pouvaient pas venir au chevet de leur proche immédiatement. Et la voilà qui faisait la malheureuse, comme si ça pouvait déranger Lynn de ne pas avoir d’amis. Tu parles, elle méprisait trop les gens.

Avec du recul je lui parlais vraiment comme à une demeurée. “je suis ton ami” avec une voix un peu aiguë et condescendante. Celle idéale pour s’adresser à un gamin idiot, genre Babylon. Jamais je n’aurais osé lui parler ainsi en sachant sa mémoire intacte. C'était un coup à recevoir un maléfice dans le dos dans quelques mois par effet de surprise. Enfin, comme elle l’était à présent, demeurée je veux dire, je ne craignais pas grand-chose. Pourtant, ça m’arrangerait bien qu’elle retrouve la mémoire rapidement, disons d’ici la fin de l’heure, que je ne reparte pas avec mon bouquet et en ayant perdu définitivement une amie de son acabit.

Mon cœur s’arrêta une deuxième fois lorsqu’elle reprit la parole. Alors non. Hors de question. Je refusais d’être témoin de ça. Et puis quoi encore ? Comment pouvait-elle oublier l’existence de la magie. C'était trop pour moi. J'allais me barrer, avec mon bouquet et sans prononcer une parole. Elle n’avait qu’à me rendre Lynn si elle voulait de l’attention l’écervelée. Mon visage devait être déconfit comme il ne l’avait jamais été. Super. J'étais une si belle personne pourtant.

Un troisième arrêt cardiaque en moins d’une heure eut raison de moi. Faites tomber le rideau. Il y avait comme un singe dans mon cerveau, je ne saisissais pas tout. Enfin si. J'avais parfaitement reconnu se rire tout droit venu des enfers. Lynn. Elle était de retour. Ou devrais-je dire elle était tout simplement et elle s’était moquée de moi. Quelle ogresse. C'était bien une façon de traiter ses amis, surtout ceux que l’on n’avait pas vu depuis une éternité. Elle pouvait repasser avec ses leçons de morales et ses jérémiades. “j’étais dans le coma” mes fesses.


Donc, en résumé, j’avais un bouquet que je ne lui avais pas encore donné. Les mots qu’elle m’avait accordés étaient, soit pour se moquer de moi, soit pour me faire des reproches. De mon côté j’étais parti du mode insultant dédaigneux au mode insultant tout court. Ces retrouvailles étaient mémorables. Du grand art.


Bon maintenant que j’avais la bonne version en face de moi je n’allais pas partir. Elle était agaçante mais j’avais quand même envie d’écouter ses justifications et pourquoi pas ses excuses.


Bon j’adorais m’écouter parler, mais si je voulais avoir son explication il fallait bien que je me taise quelques minutes.

Elle ne se vexait pas en entendant mes insultes. Au contraire, elle les retournait contre moi pour se moquer de ma petite personne. Du Lynn tout craché. Elle avait parfaitement raison, c’était bien ça le pire, puisque j’allais partir n’appréciant pas la version sans cervelle de mon amie. Puis, elle savait qu’elle avait raison. Qu'est-ce qu’elle pouvait être agaçante, elle ne m’avait vraiment pas manqué. Pour toute réponse j’inspirai bien fort en faisant rouler mes yeux. Il y avait d’autres batailles à mener et je préférais garder ma salive pour plus important. Elle comprendrait ainsi que je lui accordais le point. Uniquement pour cette fois. À la suite, elle accepta mon bouquet. J'étais bien content de m’en débarrasser, mais un peu vexé de la façon dont elle le traitait. Je voulais bien croire que ce n’était initialement pas mon genre d’avoir de telles intentions, sauf que depuis notre dernière rencontre j’avais grandi et je vivais à Paris. Enfin, note à moi-même, ne plus jamais rien lui offrir en espérant recevoir en retour un sourire et un merci.

Lynn m’invita à m’asseoir sur son lit tout en rabattant ses jambes. Je suivis son conseil sans rechigner prêt à écouter sa version de l’histoire. Pour ce que j’en savais, elle avait disparu et j’avais retrouvé sa trace en voyant sa photo dans le journal. J'avais imaginé qu’elle s’était retrouvée au mauvais endroit au mauvais moment, tout simplement. Sauf qu’elle avait dit à deux reprises qu’elle s’était retrouvée dans le coma et le titre de l’article, que je n’avais pas lu évidemment, la qualifiait “d’inconnue”. J'aurais peut-être dû le lire finalement ce torchon, parce que pas con pour un sou, je captais bien que j’avais loupé une information importante. Restait à savoir depuis combien de temps elle se trouvait à l’hôpital. Si cela avoisinait le moment où j’avais perdu sa trace plus d’un an plus tôt, j’étais en danger de mort. À sa place je serais vexé d’apprendre que je n’avais pas eu de visite depuis tout ce temps. Et merde !

Je l’écoutai attentivement. Aurait-elle pu partir tout ce temps sans donner de nouvelles ? Bien sûr que oui. Je voulais bien reconnaître quelques torts, mais pas celui d’avoir pensé qu’elle s’était purement et simplement barrée sans compter prendre contact. Je la jugeais parfaitement capable de ça, c’était en ça qu’elle était très différente de Ludmila.


Son petit jeu de culpabilisation n’allait pas fonctionner avec moi, autant être clair dès le début. Elle me donna ensuite quelques explications plutôt vagues qui ne me disaient toujours pas depuis combien de temps elle se trouvait à Feudeymon. Avant l’explosion certes, mais longtemps avant ? Je souris tout de même à sa pique sur les infirmières. Si c’était l’autre avorton de Beauxbâtons qui s’occupait d’elle, elle n’était pas au bout de ses peines. Quoi que ça leur ferait les pieds à toutes les deux. Quant à son truc de connerie j’avais touché juste. Ma baguette que c’était en rapport avec les Pozhiratelis.


Petite pause pour que l’information puisse rentrer définitivement dans sa petite tête. Elle n’avait pas à me faire culpabiliser sur ça.


Je n'avais même pas besoin de lui mentir. C'était bien la preuve que j’étais blanc comme un linge.


J'avais baissé le ton. Autant c’était drôle que les infirmières entendent les insultes qui leur étaient destinées. Autant, il valait mieux pour Lynn qu’elles ne mettent pas leur nez dans ses affaires. Ça me ferait bien chier qu’elle se fasse arrêter maintenant que j’avais retrouvé sa trace. Surtout que techniquement, elle avait un tatouage incriminant au niveau de la clavicule.

Après ma logorrhée, qui n’était pas un problème car ma voix était très agréable à écouter, je marquai une pause pour laisser à Lynn le temps de me répondre. J’avais déjà à peine relevé son affirmation, lorsqu’elle prétendait qu’elle ne m’ignorait pas. Mais bien sûr. Nous nous entendions très bien, je l’appréciais beaucoup et c’était très certainement réciproque, mais nous n’étions pas du genre dévoué l’un pour l’autre. Sur un radeau d’une place au milieu de la mer, aucun de nous deux n’accepterait de laisser sa place à l’autre. Notre relation fonctionnait très bien ainsi et si l’un disparaissait de la surface de la Terre, ce n’était pas à l’autre de tout retourner pour retrouver sa trace. Lynn était partie, ça m’avait bien soûlé, j’avais vaguement cherché, mais le fait est qu’il était alors plus probable qu’elle ait désiré me lâcher sans donner d’adresse.

Lynn me confirma qu’elle était au courant pour la chute des Pozhiratelis. Elle me semblait déçue, en même temps cela devait être étrange de se réveiller dans une tout autre dimension. Quant à savoir si je me réjouissais de cet événement, en vérité je n’en avais pas grand-chose à faire. Je ne portais pas les corbeaux dans mon cœur, mais je ne pouvais pas non plus dire que leur présence changeait beaucoup de choses à mon existence. Je n’appréciais pas le mépris de certains à mon égard, en même temps j’étais quand même vachement plus charismatique qu’eux, mais même mon égo n’était pas en péril quand ils volaient au-dessus de ma tête. J'étais simplement content que Ludmila ne soit plus obligée de jouer les potiches et de retrouver une Lynn qui ne me ferait pas une tête au carré parce que je n’acceptais pas de suivre ses pas.

Rien de bien surprenant jusqu’à présent donc. C'était sans compter sur l’art et la manière de Lynn de tout bazarder sur son passage. Je m’étais attendu à tout pour son histoire de coma, mais pas à ça. Alors là, j’étais littéralement sur les fesses et cela devait se lire sur mon visage. Elle avait trahi les Pozhiratelis. Non mais quelle idiote. Puis elle avait cherché à fuir. Elle pourrait m’en redonner des plaintes, malheureuse qu’elle était de ne pas avoir eu de visite pendant son coma. Comme je m’y attendais, elle avait tenté de fuir sans donner d’explication à ses “amis”. Je voulais bien croire que sur le coup elle avait d’autres chats à fouetter, enfin fallait pas se plaindre ensuite de se retrouver toute seule. Enfin, le clou du spectacle c’était quand même quand elle avait foncé tête baissée dans faille.


Elle était bête, c’était clair et net. Le combo trahison puis fuite plus qu’hasardeuse. Elle aurait mieux fait de jeter le Stark dans la faille avant d’être certaine d’emprunter cette piste. Ma baguette qu’il avait essayé de se débarrasser d’elle. Et maintenant elle paniquait de se retrouver dans la presse, tu m’étonnes. Enfin, d’après moi elle avait plus à craindre de la justice que des Pozhiratelis et si elle était encore dans ce lit sans menottes magiques, c’était que la première se fichait d’elle.


Macabre mais réaliste. Aussi malin que de foncer dans une faille, exemple totalement pris au hasard.


Trop généreux ce Charlie. Une bonne âme comme moi il n’y en avait pas deux.

Les démonstrations d’affection de Lynn me firent sourire. Comment ça une tape et l’idée de me faire manger par un troll n’étaient pas affectueux ? Certains avaient décidément une image de l’amitié bien plate. Si je ne pouvais pas la taquiner et avoir une réponse acerbe de sa part, ce ne serait vraiment pas drôle. C'était bien plus intéressant de se chamailler de la sorte plutôt que de l’entendre geindre sur sa situation et me montrer plein de compensations. Je la trouvais bête d’avoir agi de la sorte, ce n’était pas ma faute. Elle n’apprécia pas plus la suite, en même temps je me moquais royalement d’elle et me le fit savoir, je n’en attendais pas moins d’elle. Je me tus, estimant qu’elle pourrait cette fois mettre sa menace à exécution. Je n’avais pas envie de voir un si beau bouquet traité de la sorte.

Étonnamment, ou pas, ce fut la suite qui me vexa le plus. Comment pouvait-elle imaginer que je ne pouvais rien faire pour l’aider à quitter sa chambre d’hôpital. Elle parlait à la personne qui avait sorti d’affaire une fille bien plus bête qui s’était entortillé dans des draps bien plus beaux. Si j’avais récupéré Ludmila dans une maison glauque, à l’autre beau de l’Europe, en suivant sa trace dans un jeu de piste, je pouvais bien faire sortir cette raclure de Lynn de Feudeymon alors qu’elle se trouvait devant moi. Ce serait même un jeu d’enfant. Et si par la même occasion je pouvais créer des ennuis à l’idiote d’infirmière qui avait quitté Beauxbâtons, cela ferait d’une pierre deux coups.


Simple comme bonjour. Il ne fallait vraiment pas être le dernier des génies pour avoir cette idée. Je me savais intelligent, mais là c’était d’une simplicité désolante. Qu'elle tue une infirmière pour rendre sa fuite un peu plus palpitante. Si elle voulait se cacher chez moi, elle était même la bienvenue.


Je lui souris. C'était vraiment un plaisir de l’avoir retrouvé. Se moquer des gens faibles n’était pas si marrant. Avec Lynn nous étions sur une autre catégorie, elle allait me répondre et j’avais hâte de l’entendre.


Elle ne semblait pas me croire attentionné, ce qui était vrai la quasi majorité du temps, mais pour le coup je voulais bien lui rendre service. Et si par la même occasion je pouvais l’aider à se relooker, parce que dans mes souvenirs ce n’était pas la classe incarnée.

Lynn n’était donc ni perspicace, ni audacieuse. Comme si quitter un hôpital était la chose la plus difficile au monde, surtout lorsque la seule personne qui s’y opposait était un médecin très certainement neurasthénique. Tout ça me semblait pourtant simple comme bonjour. Je voulais bien croire que lorsqu’elle était dans le coma c’était un peu plus difficile de donner son avis, mais une grande fille comme Lynn savait ce qu’elle voulait et habituellement elle n’était pas du genre à ne pas le faire savoir. Décidément, elle n’avait jamais mis les pieds dans un hôpital moldu. Il suffisait de taper une petite crise existentielle, avec un “je veux sortir”, ponctué de deux trois larmes de crocodile et d’un pied qui tape frénétiquement contre le sol, le tour était joué. Elle me décevait de ne pas y avoir pensé et encore plus de trouver ma solution trop simple. Elle voulait quoi encore ? Que je vienne avec un corbeau tatoué sur le front et que je menace tout le monde pour que son extraction soit spectaculaire ? Désolée princesse, mais sortir d’un hôpital n’avait pas vocation à être classe.


Tout le monde peut-être pas. Généralement les patients étaient bien contents de se faire soigner sans débourser un seul centime, literie et bouffe comprises dans l’équation. Des petites vacances tout confort à se faire bichonner. Bon peut-être que le personnel était imbuvable et incompétent, mais la perfection n’existait que dans cette chambre. Moi bien sûr, Lynn ce n’était pas gagné. En revanche, ceux qui voulaient se casser de ce trou à rats le faisaient sans trop de difficultés, à moins d’être le dernier des blaireaux, mais là je n’y pouvais rien s’ils étaient nuls à ce degré-là. Je faisais quand même un minimum confiance à mon amie pour se débrouiller à obtenir sa liberté. Et en parlant de privation de liberté, est-ce qu’elle me manquerait si elle finissait en prison ? Oui ou non selon mon humeur du moment. Certainement plus oui que non, pour être parfaitement honnête, mais pas au point de me griller à tenter de la sortir de là-bas. Je n'avais clairement pas l’âme d’un hors la loi, je tenais trop à mon petit confort.


Douces paroles ponctuées d’un magnifique sourire. Elle avait trop de la chance de m’avoir à ses côtés. D'ailleurs elle avait bien saisi la perche tendue concernant les vêtements. Par Merlin, merci. Son accoutrement faisait vraiment peine à voir, bien plus que d’habitude, c’était dire. Ce n’était pas chez ses parents que j’allais lui dégoter des nouvelles fringues mais dans un magasin. Ou mieux, dans le placard d’un de mes coups d’un soir, comme ça je gardais mon argent. Ludmila n’était pas au courant, mais avec des moldus ce n’était pas de la tromperie. À mon sens en tout cas. L'option Lynn dans mon lit était une autre histoire, enfin on n’en était pas encore à ce stade.


Je faisais un effort, fallait pas me demander de le faire avec beaucoup d’emballement. Déjà je ne lui proposais pas l’option avec mes propres affaires, ça ferait trop tâche quoi que ce serait drôle de la voir enfiler un de mes caleçons qui lui arriverait aux genoux vue sa taille.

Lynn m’affirma qu’elle testerait ma technique d’évasion. Je voyais bien à sa tête qu’elle était septique. Comme si j’étais du genre à donner de mauvais conseils pour me moquer d’une personne. Bon d’accord, j’étais capable de faire ça, mais ce n’était vraiment pas le cas aujourd’hui. Même que l’idée ne m’avait pas effleurée, c’était dire ma sincérité dans l’affaire.


Du Londubat tout cracher de se planter et de mettre quand même la responsabilité sur les autres. Stark m’a indiqué une faille qu’elle m’avait dit. Et elle n’avait vraiment pas pris le temps de s’assurer que c’était sécurisé. Soit elle était bête, soit elle avait beaucoup trop la trouille. Après l’épisode Ludmila, la deuxième option me semblait compréhensible. Sans fuite et avec une trahison elle aurait certainement très mal fini. C'était d’ailleurs assez incroyable qu’ils ne l’aient pas trouvé ici. Sur ce coup, les Pozhiratelis avaient été nuls ou s’étaient faits berner.

Enfin, revenons à plus important. Est-ce que je la courtisais. Par Merlin, s’il me venait un jour cette idée, j’espérais qu’un fidèle ami m’en empêcherait. En attendant, je lui gardais tout de même une place au chaud dans mon lit si l’envie lui prenait. Je ne savais pas si je préférais Ludmila à elle, mais en attendant c’était bien l’espagnole qui me causerait le moins de tors. C'était dire après l’aventure en Suède.


Le tout assortit d’un clin d’œil. Pauvre Lynn, avec des amis comme moi, elle n’avait pas besoin d’ennemi. Enfin, l’invitation tiendrait si elle se trouvait réellement à la rue. Comme elle le disait si bien, ma générosité me perdrait. Surtout maintenant qu’elle me demandait de me rendre en Bulgarie chez ses parents. Je préférais largement la deuxième option qu’elle proposait, autrement dit qu’ils viennent, doublée de la troisième, à savoir que je lui trouve de belles fringues à Paris. Comme une pétasse, non mais elle se prenait pour qui l’autre ?


C'est vrai ça, pourquoi n’étaient-ils pas venus à son chevet ? Quels parents ingrats. J'avais beau critiquer les miens et les trouver nuls de chez nuls, je savais qu’ils seraient quand même venus me voir dans une telle situation. Même que ça m’aurait fait plaisir de comprendre qu’ils s’étaient inquiétés pour moi et précipités à mon chevet. Après presque deux ans sans nouvelles c’était la moindre des choses. Enfin, si ses parents baignaient dans les corbeaux, peut-être qu’ils étaient en prison ou du moins avaient une dent contre leur traîtresse de fille. Et elle voulait que je me pointe chez eux. Cela dit, pour leur défense, l’information sur l’identité de Lynn sur le journal n’était pas si évidente à détecter. Elle était perdue sur le coin inférieur de la première page. Simplement un petit encart qui disait que l’inconnue de Feudeymon avait été retrouvée vivante dans les décombres. Quant à la photo d’illustration, elle n’était pas très nette en raison de l’amas de cendres. Quelques patients couverts de suie étaient visibles en fond et j’avais simplement reconnu Lynn par hasard car mon œil était tombé sur ce visage familier. Franchement, pour une non une avec une illustration pas nette et pleins de personnes très peu identifiables, c’était presque un miracle d’avoir porté mon attention sur elle. À croire que depuis la disparition de Ludmila et le jeu de piste pour la retrouver, j’étais plus attentif à ce genre de détails. Il se pourrait bien qu’au fond je la cherchais cette satané Londubat.


J'imaginais totalement sur elle un petit pantalon taille haute avec un pull en cachemire. Le tout dans des tons neutres. Pourquoi pas ajouter un béret, mais elle risquait de moins apprécier ce dernier point. Rien de pétasse donc et à mille lieux de ce qu’elle s’imaginait.

Lynn déclina de manière insultante ma proposition de l’héberger. C'était donc ainsi que mes amis me remerciaient pour ma gentillesse. Je tâcherais de m’en souvenir à l’avenir, moi qui étais pourtant si chaleureux avec eux. J'espérais pour elle qu’elle aurait un endroit où crécher car je ne comptais plus lui ouvrir ma porte aussi facilement à présent.


Petit sourire condescendant. Elle voulait du sang et des larmes, j’allais lui en fournir. Et quoi de mieux que de lui rappeler qu’elle n’était pas si parfaite. Elle se méprenait sur mes fréquentations si elle pensait qu’elle était plus attirante que mes conquêtes actuelles. Leur seul défaut, qui était je devais l’admettre assez conséquent, était qu’elles n’avaient pas de pouvoir magiques. Il faut dire qu’après les quatre cent coups de Ludmila, j’avais eu besoin de décompresser et que mon nouvel environnement parisien était propice à cela. Tout ce que Cabestany ignore ne peut pas lui faire de tort. Enfin, je ne comptais pas non plus ouvrir une maison close. Il faudrait d’ailleurs que j’invite Babylon chez moi. Il n’habitait pas si loin donc il suffisait simplement de trouver quelques jours lors de ses vacances scolaires. Il avait simplement l’interdiction de ramener avec lui chiard et morue, ma bonté avait des limites. Puis, c’était avec mon meilleur ami que j’avais envie de passer du temps, pas avec les boulets qu’il se traînait. Lynn serait invitée elle pour compléter ce magnifique tableau. Comme au bon vieux temps quand j’étais venu en échange à Durmstrang. Enfin, seulement si elle me présentait ses excuses.

Trêve de bavardages. Les parents de Lynn ne comptaient donc pas venir. C'est ce que je comprenais en écoutant l’excuse qu’elle me servait. Si je me demandais d’où mon amie tenait son côté ingrat j’avais la réponse aujourd’hui. Je ne cherchais pas à appuyer davantage sur ce point, de mon côté je savais me montrer sympathique et bon et adorable et. Bref. Comme disait certain, ce n’était pas très gentil de tirer sur l’ambulance. Au lieu de cela, je préférais attaquer sur le style vestimentaire. Je n’avais jamais sincèrement prétendu être une bonne personne.


Je lui fis un grand sourire. Vraiment, elle n’avait pas envie de connaître mes fantasmes et je n’allais pas les livrer ainsi sur la place publique. À la place, j’enchaînais sur un autre sujet. Son avenir. Bah oui maintenant qu’elle n’était plus dans le coma, elle n’avait plus d’excuser pour bouger de son pieu et faire quelque chose de ses dix doigts.


Nous étions des adultes responsables maintenant. Elle avait son diplôme donc il faudrait bien trouver un autre lien à hanter. Surtout qu’elle ne pourrait peut-être pas se permettre de se retrouver sans argent de poche. Je ne savais même pas si elle avait commencé un stage quelconque avant de disparaître. Franchement j’étais curieux. Puis, elle aurait peut-être enfin la politesse de me demander ce que je fichais de ma vie et pourquoi j’avais décidé de poser mes valises dans la plus belle ville du monde.